En lien avec la crise sanitaire liée au coronavirus, les producteurs sont incités à produire moins de lait en ce mois d’avril 2020, alors que cela correspond au pic saisonnier. Difficile également de prévoir comment le marché va évoluer. D’où l’intérêt d’envisager des stratégies qui n’empêcheront pas de ré-activer la production rapidement ensuite.
« La première étape est de chiffrer le volume en moins à produire afin de pouvoir décider de l’ampleur des mesures à prendre », souligne-t-on chez Obione. Et s’appuyer sur différents leviers ensuite.
Réduire le nombre de vaches traites
Obione conseille ainsi de tarir un peu plus tôt des vaches. Celles peu rentables, à moins de 20 l de lait par exemple. Attention, cette valeur varie en fonction du seuil de rentabilité de chaque ferme. A sélectionner « parmi celles à plus de 180/200j de gestation, en particulier celles qui ont eu du mal à remplir et qui ont un stade de lactation élevé »
A condition, rappelle Obione de :
- Pouvoir les loger correctement afin d’éviter les contaminations mammaires
- Les alimenter avec une ration à faible densité énergétique et riche en fibre pour éviter une prise d’état qui serait préjudiciable au démarrage de la lactation suivante.
Autre possibilité, « réformer plus tôt les vaches qui doivent l’être, même si le prix d’une vache de réforme n’est pas incitatif : vaches vides en fin de lactation, vaches à cellules, vaches peu rentables (production à déterminer en fonction du niveau d’étable et du coût de la ration) ».
Diminuer la concentration de la ration
A savoir : « moins de concentrés et plus de NDF ». Evidemment rappelle Obione, cette action est « impossible à mettre en place pour les vaches en pâturage 100 % ».
De plus, il faut avoir en tête que « les actions sur la concentration de la ration n’auront pas les mêmes effets ni les mêmes conséquences à moyen terme en fonction du stade de lactation ».
Ainsi, si la baisse de production ne dure pas et que la réduction de production demandée reste entre 2 et 5%, « il serait dommage de modifier l’alimentation des vaches fraiches et au pic », au risque sinon d’écrêter le pic de lactation ce qui entrainera une moins bonne lactation et persistance des animaux quand il faudra produire à nouveau. « Si en plus on déconcentre en déséquilibrant la ration, on risque d’augmenter les pathologies subcliniques, des cétoses par exemple et de dégrader les performances de reproduction ».
Idéalement il faut donc commencer à limiter les apports de concentré sur les vaches en fin de lactation (>200j). Il faut avoir suffisamment de fourrage de bonne qualité pour le substituer au concentré supprimé.
Le principal concentré concerné est le concentré de production. On peut également limiter l’apport de correcteur, explique-t-on chez Obione « mais en prenant garde à conserver suffisamment d’azote ruminal pour garantir un fonctionnement ruminal optimal et maintenir le taux de matière utile ».
Réduire le nombre de traites
Cette action fait perdre entre 25 et 40 % de lait en fonction du stade de lactation auquel elle est appliquée. Par contre rappelle Obione, « le lait ne remonte jamais tout à fait au niveau initial à l’arrêt de la mono-traite (-5 à 15%) ».
Le niveau de réduction souhaité (2 à 5%) ne justifie donc pas d’y recourir sur l’ensemble du troupeau, « d’autant qu’on risque également une élévation du taux cellulaire de tank ». Y penser pour un lot de vaches en fin gestation, ce qui est possible à réaliser aussi au robot, car la lactation suivante ne sera pas pénalisée.
En résumé, Selon Obione, « tarissement précoce et réforme des animaux sont les 2 premiers leviers à actionner pour ne pas pénaliser le retour à une production normale ; si cela ne suffit pas, il faudra envisager une baisse de la distribution de concentré en fin de lactation ».
Ecrêter les pics ou passer à la mono-traite sont des décisions plus lourdes de conséquences qui ne semblent pas pour l’instant d’actualité.
Et si le lait est produit en trop grande quantité, il peut toujours servir de fertilisant, rappelle Obione. « En effet il est très riche en azote très disponible, potassium et phosphore : il peut servir à amender les cultures demandeuses en azote (maïs, céréales de printemps) ou les prairies destinées à l’ensilage ou au foin (pousse précoce de printemps ou repousse après coupe). »