Après une carrière en santé humaine, Hervé de Cidrac est le président de Zoetis France depuis deux ans. Entreprise du médicament vétérinaire, connue notamment pour ses spécialités intra-mammaires hors et en lactation et ses vaccins pour la prévention de la maladie des muqueuses ou BVD et des maladies respiratoires dues au virus respiratoire syncytial bovin ou BRSV.
Au cours de cette interview avec PLM, Hervé de Cidrac restitue l’activité de Zoetis en productions animales et la volonté du laboratoire de rester un des leaders de ce marché, en particulier en vaches laitières. Il nous parle aussi des nouveautés, qui répondent à un double objectif : efficacité et simplification.
PLM - Que représente l’activité “animaux de rente” pour le laboratoire Zoetis ?
Hervé de Cidrac : Les marchés d’animaux de rente ont tendance à stagner en France et en Europe, contrairement à ceux des animaux de compagnie qui progressent à un rythme soutenu. Jusqu’à présent, Zoetis France réalisait plus de la moitié de son chiffre d’affaires de 120 millions € avec l’activité animaux de rente. Les bovins laitiers représentent 17 % de cette dernière. La tendance est à l’équilibre entre les deux activités, mais à terme le rapport devrait s’inverser, comme cela est le cas au niveau mondial pour le groupe Zoetis, où les productions animales représentent 45 % du chiffre d’affaires proche de 6,7 milliards de dollars en 2020, toutes activités confondues.
Est-ce le signe d’un désengagement de Zoetis France pour les animaux de rente ?
HdC : Aucunement. Cette évolution est liée à la forte dynamique du marché des animaux de compagnie. Notre mission est multi-espèces et notre activité “animaux de rente” est un des piliers de développement du laboratoire. Zoetis est un acteur majeur en bovins laitiers et compte bien le rester. Nous affirmons clairement notre volonté de développer notre notoriété et nos services auprès des éleveurs et de leurs vétérinaires.
Notre laboratoire investit significativement dans la recherche et le développement de spécialités destinées aux productions animales. Preuve en est du lancement réalisé en décembre 2020 d’un médicament associant un antibiotique et un anti-inflammatoire pour les bovins. En 2021, nous lancerons un nouveau vaccin destiné aux régions qui ont mis en place un plan d’éradication du virus de la maladie des muqueuses, le BVD.
Enfin, Zoetis a mis en place des groupes internationaux dont la mission est de partager les expériences et de mettre en commun les besoins des filières laitières selon les zones géographiques. Leur travail oriente en partie la recherche du laboratoire. Notre chef de produit gammes antibiotiques et intra-mammaires ruminants, Fabrice Magnin, y participe.
Quelles sont les conséquences pour votre laboratoire de la réduction du recours aux antibiotiques en élevages laitiers ?
HdC : Notre laboratoire est sensibilisé depuis plusieurs années à la nécessité de mieux utiliser les antibiotiques pour limiter les risques d’antibiorésistance. Cela débute par de nouvelles formulations de nos antibiotiques, comme la spécialité lancée fin 2020 pour le traitement des pathologies respiratoires avec hyperthermie chez les bovins. Son administration en une seule fois favorise l’observance du traitement, réduit les risques de rechute et ainsi le recours à d’autres antibiotiques.
Le développement de futurs vaccins contre certains agents pathogènes respiratoires ou responsables de mammites contribue de même à réduire l’usage d’antibiotiques.
Par ailleurs, notre recherche apporte d’autres solutions pour une meilleure identification des germes pathogènes. C’est le cas du nouvel outil que nous proposons au sein du service Orbaudit : OFC ou On Farm Culture pour que l’éleveur réalise lui-même la bactériologie du lait lors de certaines mammites, selon un protocole défini avec son vétérinaire. Cet outil s’inscrit pleinement dans le bon usage des antibiotiques pour limiter les risques d’antibiorésistance.
Quelles sont les priorités de développement du laboratoire ?
HdC : Nos axes prioritaires répondent à notre volonté d’apporter des solutions innovantes qui assurent une valeur ajoutée dans la gestion de la santé des troupeaux et contribuent à la qualité des produits animaux, en particulier le lait. Mieux nous prenons soin des animaux, meilleure sera la qualité de leur production.
Nous n’avons pas de gammes privilégiées, toutes bénéficient de cette stratégie, que ce soit celle de la santé de la mamelle, des antibiotiques injectables, des vaccins, des antiparasitaires, des anti-inflammatoires, de la reproduction, de la réhydratation…
Nous sommes attachés à simplifier nos solutions tout en assurant leur efficacité. Cette simplification est indispensable dans un contexte où les éleveurs ont une charge de travail importante et que la main d’œuvre est difficile à recruter.
Que représente le concept de santé globale, One Health, pour Zoetis ?
HdC : Nous y sommes pleinement inscrits. D’ailleurs, la signature du laboratoire est la suivante : “prendre soin de notre monde et de l’humanité en faisant progresser la santé animale”. C’est une véritable profession de foi, car la santé animale a un impact sur la qualité de l’alimentation humaine. De même, les innovations vétérinaires doivent avoir un impact positif, au minimum neutre, sur l’environnement.
Quelles innovations majeures peut-on attendre dans les années à venir ?
HdC : La génomique est un enjeu majeur, dans lequel est déjà engagé Zoetis en Amérique du Nord. Avec cette discipline, nous pourrons évaluer certains critères de santé au sein de troupeaux laitiers.
Notre stratégie est de proposer des solutions et outils à toutes les étapes de gestion de la santé animale. De la génomique aux traitements, en passant par le diagnostic et la prévention.
Zoetis est aussi le seul laboratoire à avoir développé des anti-corps monoclonaux pour des animaux, le chien en l’occurrence, pour la prise en charge de la dermatite atopique et des douleurs arthrosiques. Le laboratoire capitalise dans cette plate-forme scientifique… et il n’est pas exclu que des spécialités soient un jour disponibles pour les vaches laitières.
Interview réalisée par Loïc Doumalin