Les revenus des éleveurs laitiers continuant d’être insuffisamment rémunérateurs, beaucoup d’entre eux cherchent des voies de diversification. En plus de la fabrication de yaourts ou de fromages, il leur est désormais possible de produire des glaces à la ferme. C’est ce que proposent depuis l’an dernier deux sociétés : Invitation à la Ferme et Compagnie Laitière des Glaces Paysannes, sous sa marque La Mémère. Les deux s’adressent à de petites exploitations familiales bio et offrent des recettes clés en main et des conseils pour l’installation. Le réseau Invitation à la Ferme, qui s’est construit en 2015 autour des yaourts, s’est diversifié avec des glaces en 2020. En 2021, deux exploitations produisent des crèmes glacées, sorbets et bûches avec le lait de la ferme. Les formules ont été mises au point par le MOF (Meilleur Ouvrier de France) Jean-Jacques Borne. Le foisonnement est très bas, les pots de glace de 450 ml pesant entre 381 et 413 g. De son côté, la Compagnie Laitière des Glaces Paysannes a été créée en 2019 par Arnaud Montebourg et Stéphane Le Saouter. Les premières productions ont été lancées l’an dernier et deux fermes produisent des glaces sous la marque La Mémère. Les six recettes ont été imaginées par le MOF David Wesmaël, pour un poids de 400 g au 500 ml.
PROPRIÉTAIRE OU LOCATAIRE
Mais sous un même objectif, apporter de la valeur ajoutée aux éleveurs par une meilleure rémunération et créer des emplois, elles offrent deux modèles économiques bien différents.
Invitation à la Ferme a opté pour un système de conseils et d’aide technique à l’installation : l’éleveur fait construire l’atelier en fonction de ses besoins et le réseau l’aidera à monter le projet, sélectionner les équipements, lui apporter la formation à la transformation… « Les achats d’ingrédients et d’emballages sont mutualisés, ce qui permet une économie de 20 % des coûts », souligne Corinne Charote, responsable marketing de la marque. L’exploitant est propriétaire à 100 % de son installation et récupère la totalité des bénéfices en vendant lui-même ses glaces sous la marque Invitation à la Ferme. En échange, il paye un ticket d’entrée pour rejoindre le réseau et une cotisation mensuelle en fonction de ses achats et ventes.
Pour sa part, la Compagnie Laitière des Glaces Paysannes propose de créer une coentreprise avec l’éleveur. Ce dernier apporte 5 100 euros (51 % des parts et des bénéfices) et en devient président. « C’est un modèle inédit avec zéro endettement pour l’éleveur. Nous finançons la création d’un atelier qui s’élève à 350 000 euros », explique Claire Giuliani, directrice commerciale chez La Mémère. La coentreprise va ensuite louer à la Compagnie les installations, à savoir six containers tout équipés pour la transformation et le conditionnement. Cette dernière s’engage à racheter toute la production et revend les glaces au niveau national en grandes surfaces et en ligne sous la marque La Mémère. Le risque financier et l’implication sont donc moindres, mais les bénéfices également.
Le positionnement prix a beau être élevé (de 13 à 17 € par kg) pour une commercialisation en grande surface, les deux modèles ne craignent pas la guerre des prix. « Les enseignes sont intéressées par ce modèle qui entre en résonance avec leur stratégie de transition alimentaire. Ce concept d’achat comme acte citoyen fait écho à ce qu’elles veulent communiquer auprès du consommateur », témoigne Claire Giuliani. « Les gammes fonctionnent très bien car elles répondent à de vraies attentes des clients autour du bio, du local et du fermier. Séparément, chaque axe a du succès, mais ensemble, c’est le triptyque gagnant! », poursuit Corinne Charote. Les deux sociétés sont d’autant plus confiantes qu’avec le Covid-19, l’attrait pour ce type de produit s’est accru.
